Les sols en béton apparent ?
Je dirigeais depuis vingt ans une grosse entreprise du bâtiment quand la guerre du Golf a chamboulé tout le secteur. Il a fallut évoluer vers un secteur innovant.
Aujourd’hui, le béton est une option de décoration évidente mais pas à l’époque : les sols étaient recouverts de parquets ou de moquette, j’ai proposé de laisser le béton brut apparent.
Et la recette du béton ciré ?
Je connaissais la technique des sols en terrazzo dont on nourrit le granulat avec une pâte-cire, pourquoi ne pas adapter la recette au béton ? Les premiers essais sur des dalles coulées de 1m2, m’ont séduit par leur aspect très sensuel. Une fois cirées, elles se patinaient bien.
Des sols, je suis passé aux plans de travail en préparant une collection chaque année ainsi que la première palette de couleurs pour un fabricant. La presse a beaucoup relayé cette innovation, des ingénieurs du béton passaient à l’atelier s’imprégner de mon travail.
Et le béton translucide ?
Dans mon show-room il y avait en vitrine un écrin remplit de billes de verre poncées, éclairées par une lampe. En incrustant ces billes dans des surfaces de béton, qu’elles traversaient de part en part, j’ai illuminé des tables et des tableaux avec de la fibre optique, effet garanti.
Vous avez fait entrer le béton au Mobilier national ?
Un ministre de la Culture de Jacques Chirac voulait donner leur chance à des artistes contemporains pour réaménager son bureau. J’ai proposé un modèle de bureau en béton que Mobilier national a acheté ainsi qu’une table basse. Le président Jacques Chirac l’a choisi pour meubler son cabinet de travail quand il a quitté l’Élysée.
Retourné dans les réserves du Mobilier national, Brigitte Macron l’a repéré à son tour pour le bureau du président Emmanuel Macron.
Comment travaillez-vous ?
Je dessine en fonction de la demande. Pas de beaux dessins mais beaucoup de rigueur et de poésie. Je prépare les formes en bois qui seront coulées par un mouleur. Il y a beaucoup de formes et d’objets dans mon atelier d’Ivry-sur-Seine : 450 m2 dans l’ancien laboratoire de Frédéric Joliot-Curie. Je suis plus artiste que commercial. Je sculpte, je peins des tableaux avec le béton même si je suis daltonien. Tout est fait en coulage avec les couleurs en fond de moule.
Quels sont vos projets ?
J’adore le matériau “béton” et je suis fier d’avoir fait école. Le bonheur ? Être dans mon atelier, travailler dans l’exceptionnel et faire des œuvres qui tiennent la route. Je travaille toujours en fonction de la demande pour faire du béton “Haute-couture”.
Récemment, j’ai réalisé des corners-boutiques pour les parfums et les bijoux Christian Dior. Le béton fait partie de nos racines, du règne minéral, comme le sable, les roches et les montagnes, je veux continuer à le travailler avec rigueur et poésie.