Avec la Sun Tower, le studio OPEN Architecture réinterprète de façon contemporaine la typologie architecturale du phare, et ancre son geste dans l’histoire locale — nous sommes sur une terre où se pratiquait le culte du soleil dès l’Antiquité, et où furent érigées, à l’époque Ming, des tours de guet.
Une fusion entre phare, cadran solaire et centre culturel
Abritant un théâtre, une bibliothèque, un café et des espaces d’exposition, le volume conique de la tour s’ouvre vers la mer, laissant pénétrer la lumière et le vent. L’édifice a été pensé comme une structure solaire, où le parcours des visiteurs suit le mouvement du jour : la bordure nord du bâtiment s’aligne avec le soleil de midi lors des équinoxes ; le tunnel d’entrée capte le soleil couchant pendant le solstice d’hiver, le théâtre semi-ouvert pointe vers le lever du soleil au-dessus de l’île Zhifu lors du solstice d’été… Sur l’esplanade, une série d’anneaux elliptiques évoque les orbites planétaires. Au sommet, le Phenomena Space offre une vue spectaculaire sur la mer et, depuis un oculus central, recueille la pluie dans un bassin, invitant à la contemplation. Autant de dispositifs qui rappellent la fonction originelle des observatoires et des cadrans solaires.
©v2com / OPEN Architecture
Un dispositif structurel et climatique
Le bâtiment repose sur une double coque en béton armé, légèrement inclinée, réalisée en étroite collaboration avec les ingénieurs d’Arup. Les deux coques, reliées et renforcées par des dalles horizontales et des rampes, forment un volume creux et autoportant. La forme conique et l’ouverture vers la mer nécessitaient une structure capable de résister à des charges asymétriques. Le béton a l’avantage de pouvoir être modelé à l’envi et de transmettre les charges efficacement. La conception paramétrique a permis d’optimiser l’épaisseur des coques, la répartition des efforts, et de minimiser les zones de stress tout en gardant l’esthétique souhaitée.
Grâce à la hauteur de la tour, à ses ouvertures et à la configuration des coques, le bâtiment exploite l’effet de cheminée pour extraire l’air chaud, couplé à une entrée d’air frais dans un tunnel – pour une climatisation naturelle. Grâce à sa masse et à son inertie, le béton agit comme un tampon thermique, amortissant les fluctuations de température intérieure.
©v2com / OPEN Architecture
Un béton poétique
Pour parfaire cette osmose avec les éléments, la coque intérieure concave, tournée vers la mer, absorbe les sons de l’océan, les amplifie à travers la structure et les renvoie vers l’amphithéâtre situé à la base. Le choix du béton est ici crucial : masse, forme, inertie acoustique.
Coulé sur place, le matériau a fait l’objet d’une mise en œuvre particulièrement soignée. A l’extérieur, clair et lisse, il reflète les variations de la lumière et offre une dimension sculpturale à l’édifice. À l’intérieur, il conserve l’empreinte du bois des coffrages, pour une texture rugueuse. Cette dualité crée une architecture qui se lit autant par la vue que par le toucher.
La Sun Tower illustre une manière de concevoir qui ne repose pas sur la sophistication technique, mais sur une compréhension fine des ressources naturelles et de la performance intrinsèque des matériaux. Le béton y constitue un vecteur de stabilité, de masse, de lenteur… de durabilité. Il dépasse aussi sa fonction structurelle pour devenir sensible. Loin d’être un objet seul, l’architecture est un écosystème reliant la matière et le climat, la culture et le lieu, le corps et le cosmos.