Structure polyédrique en béton imprimé
Invité à la Biennale du Centre culturel européen de Venise, le docteur Masoud Akbarzadeh, directeur du Polyhedral Structures Laboratory (PSL) à l’université de Pennsylvanie, y présentera le projet Diamanti, une passerelle en béton imprimée en 3D, renforcée par précontrainte.
Ce chercheur, mathématicien et architecte travaille, depuis 2012, sur les structures polyédriques (ou polyhédrales) avec un objectif essentiel : minimiser leur masse pour réduire l’impact matériau dans leur empreinte environnementale.
Sa méthodologie de conception s’appuie sur un procédé du XIXe siècle, la statique graphique 2D (basée sur les diagrammes de forme et de force.) La rupture technologique du projet Diamanti a été rendue possible grâce aux travaux de recherche sur la statique graphique 3D et l’impression 3D du béton.
Transfert des charges et économie de matière
La statique graphique 3D est une méthode d’analyse et de conception structurelle (CAO) qui représente l’équilibre des forces à l’aide d’outils géométriques et autorise l’élaboration de structures spatiales complexes.
L’optimisation des formes pour transférer les charges dans la structure permet de placer le matériau uniquement là où il doit être, et d’en limiter ainsi la quantité.
« Nous concevons la géométrie de manière que le transfert des forces internes dans les éléments devienne ‘axial’ et minimise le moment de flexion, la torsion et toute autre force qui nécessiterait une augmentation de la section des éléments », explique Masoud Akbarzadeh.
Des recherches qui ont abouti au projet Diamanti, une passerelle à l’échelle 1, réalisée à partir de neufs éléments en béton imprimés 3D et assemblés par collage et post-contrainte.
« Avec ce projet, nous voulions d’une part minimiser la quantité de béton et d’acier, afin de réduire les émissions de carbone, et d’autre part, trouver un moyen de renforcer le béton sans noyer les aciers dans le béton, afin de pouvoir les extraire facilement en vue d’un recyclage et d’une réutilisation ultérieurs. »
Masoud Akbarzadeh, directeur du Polyhedral Structures Laboratory (PSL) à l’université de Pennsylvanie.
Légère mais ultra-résistante
Bio-inspirée avec sa forme creuse ressemblant à un squelette, la passerelle Diamanti minimise les émissions de carbone grâce à la réduction des matériaux et au recours à la précontrainte appliquée par post-tension. Constituée de seulement deux couches de béton imprimées, elle pèse moins de 8 tonnes, pour 9 mètres de long et 1,5 mètre de large.
Une fois imprimés, les neufs voussoirs ont été scellés entre eux à l’aide d’une colle époxy et de câbles de post-tension, enfilés dans les cavités de l’ouvrage et gainés de manière à ce qu’ils appliquent la même tension sur toute la longueur, sans adhérence.
« Avec ce projet, nous voulions d’une part minimiser la quantité de béton et d’acier, afin de réduire les émissions de carbone, et d’autre part, trouver un moyen de renforcer le béton sans noyer les aciers dans le béton, afin de pouvoir les extraire facilement en vue d’un recyclage et d’une réutilisation ultérieurs. »
Des tests de résistance ont démontré que Diamanti peut supporter une charge deux fois plus élevée que celle de 500 kg/m2, exigée pour les passerelles. Par rapport à une passerelle en béton armé traditionnel sans précontrainte, la quantité de béton utilisée est réduite de 60% et celle d’armatures de 94%. Durable, l’ouvrage est par ailleurs aussi rapide à réaliser que facile à recycler.
Preuve de concept
Tout ce travail est le fruit d’une collaboration multidisciplinaire entre chercheurs, laboratoires et industriels. Conçue par le Polyhedral Structures Lab (PSL) de l’Université de Pennsylvanie, la passerelle a été imprimée par Carsey 3D avec un micro-béton fibré fourni par Sika. La société Ævia a validé les calculs et appliqué la post-contrainte, et le Cerib a réalisé les tests de résistance de la passerelle.
Au-delà du tour de force, Diamanti constitue bel et bien une preuve de concept, et ouvre le champ des possibles. Cette technologie pourrait très prochainement être appliquée à de véritables passerelles piétonnes, mais aussi aux planchers allégés et poutres de bâtiments.