La maison d’un inventeur
À Saint-Denis (93), au numéro 72 de la rue Charles-Michels, se dresse une maison dont il ne reste, à peu de choses près, que les murs extérieurs. Impossible d’y échapper, tant elle domine la Seine avec majesté.
Longtemps squattée, recouverte de tags et de végétation, elle fut la demeure de l’une des grandes figures de l’histoire du béton : François Coignet (1814-1888), un ingénieur et capitaine d’industrie du XIXe siècle, à qui l’on doit le béton aggloméré, précurseur du béton armé, qui révolutionna les techniques de constructions du logement social.
L’objectif de la réhabilitation
La Maison Coignet témoigne aujourd’hui encore de l’inventivité de son propriétaire, et l’on peut mesurer l’étendue de ses recherches sur le béton en observant le mur de soutènement, où apparaissent les différents tests qu’il effectua lors de sa construction, en 1853.
Considéré comme la plus vieille maison en béton de France, la Maison Coignet est aujourd’hui inscrite au titre des Monuments historiques. Il ne reste plus qu’à la réhabiliter, comme ce fut le cas, en 2016, pour l’immeuble Coignet situé à quelques encablures de là.
La réhabilitation, tel est justement le combat de l’association “La Maison Coignet”, qui a eu la bonne idée de proposer à l’ESTP Paris de lui faire des propositions en ce sens.
Parmi la cinquantaine de projets imaginés par les étudiants, c’est celui de “Maison Street Art” qui a été choisi par les membres du jury de la Chaire ingénierie des bétons pour représenter l’école au concours 2019 des Génies de la construction.
Un lieu dédié au street art
Porté par six élèves ingénieurs du campus de Troyes (Yves Judenne, Amandine, Debeaumarché, Eva Andrianomenjanahary, François Riondel, Alexandre Trelut et Edern Viannay), la Maison Street Art réinvente purement et simplement la Maison Coignet.
« François Coignet était un inventeur, et nous devions trouver comment conserver cet esprit créatif. Pour que le bâtiment attire du monde, il fallait le rendre dynamique, lui donner une fonction centrale dans Saint-Denis », raconte Yves Judenne. Lui et ses camarades se sont donc interrogés sur la vocation culturelle d’un tel lieu.
Et très vite, l’idée d’un endroit dédié au street art, qui englobe toutes les formes d’art issues de la rue (graffiti, pochoir, affichage, tag, etc.), s’est imposée.
« Notre projet consiste à faire de la Maison Coignet un musée, mais aussi une école de street art, où des expositions, des rencontres et des soirées pourraient être organisées », poursuit-il.
Le rôle central du béton
Comme dans la maison d’origine, le béton y conserverait toute son importance, puisque le béton pisé (mélange de sables, de graviers, de cailloux, de chaux grasse, de terre et de résidus industriels) utilisé par François Coignet serait rénové, tandis que la structure centrale serait constituée de poteaux et de poutres en béton.
Et si, dans quelques années, il était envisagé de changer de concept, nos étudiants ont prévu une structure réversible au niveau des étages. De quoi s’adapter facilement et économiquement à toute nouvelle idée !