Pouvez-vous nous resituer l’origine du projet ?
Charles-Henri Tachon : La ville souhaitait réactiver un marché couvert installé au rez-de-chaussée d’un immeuble des années 1970, peu visible et en perte de vitesse. L’opération a permis de démolir une partie de la halle existante, de reconstruire un équipement plus généreux, et d’ajouter un parking souterrain. Bien plus qu’une simple modernisation, le projet a été l’occasion de recomposer un morceau de ville à l’échelle de l’îlot des Avelines. Saint-Cloud est une commune en pente, avec peu d’espaces publics : la municipalité souhaitait créer une véritable « place du village ». Avec ce projet, nous avons proposé de saisir cette opportunité pour renforcer les relations avec le jardin des Avelines, le musée, la médiathèque et le conservatoire mitoyens.
« De tout temps, une halle de marché est un espace assez simple, qui protège des intempéries. Nous nous sommes inspirés des belles structures en béton des ingénieurs du début du XXe siècle, comme l’Italien Pier Luigi Nervi ou le Mexicain Félix Candela. »
Charles-Henri Tachon, architecte et fondateur de l’agence Charles-Henri Tachon, architecture & paysage
Quels grands principes ont guidé la renaissance de cette halle ?
Ch.-H. Tachon : Nous sommes dans un environnement patrimonial et minéral, marqué par le musée municipal et les petites maisons du XIXe siècle qui font le charme de Saint-Cloud. Il nous a donc semblé important que la halle s’impose à la fois comme un équipement public, avec une forme architecturale forte, et comme une construction ancrée dans cette identité locale. De tout temps, une halle de marché est un espace assez simple, qui protège des intempéries. Nous nous sommes inspirés des belles structures en béton des ingénieurs du début du XXe siècle, comme l’Italien Pier Luigi Nervi ou le Mexicain Félix Candela.
Le choix du béton s’est donc imposé naturellement…
Ch.-H. Tachon : Il répondait à une triple logique. D’abord, pour moi, l’architecture doit exprimer la structure. Le béton, que j’affectionne particulièrement, permet d’allier économie de moyens, qualité spatiale et expression architecturale. Nous avons donc proposé une structure unique et lisible : une trame régulière de poteaux en béton, chacun surmonté de nervures portant la dalle de toiture. Sans cette solution, il n’aurait pas été possible d’installer une toiture végétalisée de 26 cm d’épaisseur. Le béton s’imposait aussi pour des raisons de sécurité incendie, notamment en raison des logements situés à proximité.
Quelles ont été les spécificités techniques de la mise en œuvre ?
Ch.-H. Tachon : La principale difficulté venait de la déclivité du terrain. Nous avons donc conçu une halle en pente douce, qui absorbe le dénivelé, libère un large parvis urbain sur rue, et permet un cheminement PMR continu jusqu’au jardin des Avelines. La structure a été entièrement coulée sur place. Les dalles entre les nervures ont été préfabriquées puis posées. Un prototype à échelle 1 nous a permis d’ajuster les détails et de tester une formulation de béton en consistance S3, offrant un bon équilibre entre fluidité et tenue. Le chantier a nécessité un vrai savoir-faire pour décoffrer les éléments sans reprise visible. Avec le béton, en un seul geste, ces trois problématiques étaient réglées.
Comment cette nouvelle halle est-elle perçue par les habitants ?
Ch.-H. Tachon : Depuis sa livraison en mai 2024, la halle fonctionne très bien. C’est une vraie réussite. Les habitants se sont rapidement réapproprié le lieu. Le marché est vivant, et le food court, très fréquenté, en fait un véritable espace de sociabilité. La toiture végétalisée, en plus de ses qualités esthétiques et écologiques, améliore le confort d’été en limitant l’effet d’îlot de chaleur. Lisible, lumineuse, structurée mais chaleureuse grâce à ses habillages en bois, la halle incarne une nouvelle centralité urbaine, un lieu de vie partagé et durable.