Château Réaut vient d’inaugurer son nouveau chai. Pourriez-vous nous raconter ce projet ?
Yannick Evenou : J’ai racheté cette propriété en 2012 au groupe Roederer (voir encadré). Ils avaient un grand projet, mais ils sont partis sur une autre opportunité avant d’avoir refait le chai qui date d’avant-guerre.
Il nous a fallu cinq ans pour mener une activité qui permette de financer la construction d’un nouveau chai. Le projet a été lancé en 2016, le permis obtenu en 2017. Les travaux ont commencé en janvier 2018, et le chai vient d’accueillir sa première vendange.
Nous y avons ajouté une grande terrasse attenante, de 250 m2, qui surplombe la vallée et qui va permettre d’organiser des moments conviviaux tout au long de l’année, et plus particulièrement durant les vendanges. Et nous avons prévu aussi une salle de restaurant, qui sera prête à la mi-2019.
Ce n’est pas tout de produire du bon vin, il faut pouvoir l’expliquer. Or, la meilleure explication passe par la dégustation. Ce restaurant permettra de découvrir nos vins dans les meilleures conditions.
Vous avez notamment équipé le chai de cuves en béton. Ce matériau favorise-t-il la vinification ?
Y. E. : Pour faire des cuves, vous avez trois options : le bois, l’inox et le béton. Le bois est très bien mais onéreux, et son entretien compliqué. L’inox est très pratique mais a une faible inertie thermique, qui peut être réduite en recouvrant la cuve d’une deuxième enveloppe, la “double peau”.
Quant aux cuves en béton, elles existent depuis longtemps, mais elles ont longtemps été très volumineuses, ce qui créait des écarts de température à l’intérieur et rendait plus difficile la maîtrise de la vinification. Malgré tout, nous avons fait le choix du béton, et pour éviter ce phénomène, nous avons fait des cuves de 110 hectolitres. Nous en avons 24.
Parce que le béton est économique. Il est aussi très facile à entretenir et il présente une bonne inertie thermique avec des parois de 120 mm d’épaisseur. La possibilité de choisir la forme permet également un gain de volume par rapport aux cuves cylindriques.
En quoi ces vertus complètent-elles habilement celles du terroir ?
Y. E. : Nous avons privilégié des cuves en forme de parallélépipèdes, en pyramides inversées, créant en outre un effet de voûte très esthétique. Car, quand la surface au sommet de la cuve est plus étendue que la base, la surface de contact marc/jus est plus importante, le “gâteau de marc” est moins épais (c’est-à-dire les peaux de raisin qui flottent au-dessus du jus). Et le brassage est alors plus efficace et plus doux.
Avec un “gâteau” épais, le vin risque de récupérer des goûts herbacés, moins agréables. Si la qualité du raisin influe à 90% sur celle du vin, la technique de vinification impacte les 10% restants. Ce qui n’est pas négligeable.