Une formation dans la filière horticole, une autre en école de commerce, à HEC, David Guinberteau n’était pas prédestiné à travailler le béton. Les 50 kilos des amplis de sa chaîne Hi-fi vont provoquer le déclic. Sous leur poids, les étagères en bois ployaient, le verre trempé résonnait.
« J’ai eu l’idée de ferrailler du béton et de le texturer avec un sac en plastique froissé. Mon premier meuble en béton était né ! Avec lui, en 2003, j’ai réalisé combien j’aimais le design. Je suis allé rencontrer des artistes dans des salons, ils m’ont conseillé de me lancer. »
David les écoute. Il crée Empreinte minérale et s’installe dans un atelier de 15 m2. On lui passe des commandes de mobilier et de luminaires en béton. Il dessine très peu et travaille à l’instinct pour arriver au résultat qu’il a en tête. Ses formes deviennent de plus en plus complexes.
« Je cherche toujours à alléger mes meubles le plus possible. Des modules sont coulés avec des jeux de fenêtres, qui créent des perspectives, des horizons, un jeu de transparence. Tous mes moules sont réalisés à l’atelier et avec le BFUP, j’arrive à obtenir des épaisseurs très fines de 15 à 19 mm Certaines empreintes sont encore plus fines. J’aime l’aspect brut travaillé très proprement, juste légèrement poncé. »
Explorer la matière, aider l’idée à prendre forme
Découvrir, comprendre, aller jusqu’au bout d’une forme, explorer la matière et passer à autre chose… cette recherche infinie est une thérapie pour David. L’idée de ne pas maîtriser complètement la matière le séduit.
« J’invite la forme à aller où je veux, de l’état liquide à l’état solide, mais le béton fait ce qu’il veut, selon la température et l’hydrométrie. Cette matière est très tactile. »
Découvrir, comprendre, aller jusqu’au bout d’une forme, explorer la matière et passer à autre chose… cette recherche infinie est une thérapie pour David. L’idée de ne pas maîtriser complètement la matière le séduit.
« J’invite la forme à aller où je veux, de l’état liquide à l’état solide, mais le béton fait ce qu’il veut, selon la température et l’hydrométrie. Cette matière est très tactile. »
Même les ratages peuvent devenir les plus belles pièces : il faut juste savoir accueillir les formes. « Et si je la transformais comme ceci ? ou comme cela ? » Deux pièces écartées dans un coin de l’atelier ont ainsi trouvé leur voie en étant retravaillées avec du métal. Les mélanges du béton avec le bois, le métal ou le plexy sont au cœur de ses prochaines créations ainsi que la modularité.
Pour le tapis Palazzo, par exemple, il mixe les codes du tapis traditionnel avec ceux des mosaïques qui ornaient les sols des grandes demeures.
« Plusieurs plaques de béton texturé croco sont posées sur le sol, sans collage. On peut les déplacer. Une artiste textile a créé un îlot centrale en feutre. J’aime l’idée du végétal qui transperce et ce feutre me fait penser au lichen sur le rocher. Le résultat est à la fois très doux, minéral et résistant. »
La couleur joue aussi un rôle important dans l’univers d’Empreinte minérale. Certaines pièces de la gamme Gelule ont un aspect vitrifié.
« Pour obtenir ces effets émaillés, je verse du glaçage dans un support fermé avant de couler mon béton. L’effet obtenu est complétement aléatoire. D’habitude, je colore le béton dans la masse avec des pigments minéraux naturels. »
Des meubles en béton qui revisitent la grammaire des styles
Pour les meubles en béton d’Empreinte minérale, David s’inspire du mobilier des années 80-90 qu’il aime revisiter.
« On croit créer alors qu’en fait on relit, dit-il. Nous évoluons et le mobilier évolue avec nous. J’aime les objets utiles, adaptables. Une de mes bibliothèques est conçue en trois parties. Les modules ont des hauteurs différentes. On peut en faire plusieurs petites bibliothèques, un siège ou une table de chevet. »
David se lève très tôt avec le stress de faire dans la journée tout ce qu’il a dans la tête. Quitte à oublier son repas, il reste dans sa bulle, concentré sur ses projets de moules qui sont toujours pensés à l’envers et en creux. Sa journée ne finit qu’avec la pièce achevée.
Des projets ?
« J’aimerai réaliser et vendre toutes les idées que j’ai en tête ! J’aimerai travailler, échanger avec des designers, étudier avec eux les aspects techniques et la faisabilité. Actuellement, je suis sur un projet, mélange d’installation et de mise en scène. Il sera peut-être un jour exposé dans un grand musée d’art contemporain. Je veux aussi continuer à concevoir des lampes, des bibliothèques. En ce moment, je cogite une montée d’escalier qui serait intégrée dans une bibliothèque et des tables basses en béton qui recréeraient des bâtiments célèbres. Ce serait des pièces uniques à moule unique. »