Quelle idée domine votre projet “Habiter la frange ferroviaire” ?
Mon projet a pour ambition de redévelopper la zone ferroviaire reliée à la gare de Feyzin, dont la réserve foncière est extrêmement intéressante. Ce quartier va prendre de l’ampleur : Lyon va se développer vers le sud, et la voie ferrée va devenir le support d’un tramway à grande échelle. Sur 300 mètres, mon projet est une succession de murs en béton sculptés, qui ondulent le long de cette voie – parfois le mur devient habitat, parfois il est jardin. Comme cette sculpture de béton propose des volumes habités, elle est séparée de la voie ferrée par un mur antibruit, sur lequel une balade urbaine haute relie les deux parties de la ville. Tout au long de cette voie se trouvent donc des zones pleines –habitats et bureaux – et vides – parcs et jardins –, qui viennent se rattacher au territoire.
Pourquoi avoir choisi un béton cyclopéen (1) fabriqué avec des débris de démolition pour le mur antibruit ?
Pour ce mur antibruit, qui permet de proposer de l’habitat, il me fallait un effet de masse pour bloquer les ondes. Et comme il y a beaucoup de hangars en parpaings et de constructions vétustes dans la zone, j’ai imaginé un béton mélangé à des gravats qui seraient récupérés au moment de la destruction. Ce choix correspond à un souci de réemploi et d’utilisation du présent pour construire le futur.
Et pourquoi le Cématerre (2) pour les lames habitables ?
Je voulais un matériau lourd, non seulement pour bloquer les ondes en provenance des voies ferrées, mais aussi pour garantir une protection contre d’éventuels dangers industriels – le projet se trouve en effet dans une zone de Plan de prévention des risques technologiques (PPRT). Je me suis donc orienté vers le béton. Et en réalisant qu’il y aurait beaucoup de terrassements et d’extraction de terre, j’ai opté pour un béton qui puisse s’en resservir, à savoir le Cématerre.
En plus de ses capacités de résistance et de sa durabilité, quelles sont les autres qualités que vous trouvez au béton ?
J’aime son esthétique. Je voulais un matériau pur, minimaliste, uniforme, pour exprimer cette force de la ligne. Par ailleurs, le mélange terre et ciment permet d’avoir des murs plus épais, qui isolent sur le plan acoustique. Enfin, comme mon projet alterne habitats et jardins, j’avais ce souci d’un matériau unique, qui puisse être tour à tour dans la terre, et hors de terre. Et qui ondule tout le long de la voie ferrée. Le béton m’offrait tout cela.
(1) Béton contenant des gros blocs de pierre, des moellons, etc. (jusqu’à 200 mm) ; il est utilisé pour des ouvrages massifs ne demandant pas de résistance mécanique élevée.
(2) Béton constitué de 85 % de terre mélangée à de la chaux, du ciment et du lin.