Quelle est la genèse du projet ?
Cet aménagement correspond à la volonté du département des Hauts-de-Seine de multiplier les îlots de fraîcheur. La cour du collège Georges Pompidou devait répondre à trois objectifs : améliorer le cadre de vie des collégiens, réduire l’impact environnemental à l’aide de solutions de gestion des eaux pluviales, et accroître la résilience au réchauffement climatique. Avec des chaleurs toujours plus fortes et plus longues, le cadre extérieur devient un élément clé de confort climatique pour des établissements tels que celui-ci.
Quelle a été votre approche ?
Le collège souhaitait capitaliser sur l’une de ses spécificités : l’enseignement du japonais, qui y est suivi par de nombreux élèves. Il m’a donc été demandé de travailler sur le thème du Japon. Je voulais un dessin qui n’entrave pas les grandes circulations, permette aux collégiens de faire du sport et leur offre des tas de façons de s’asseoir. Mais aussi qui plaise aux jeunes et aux adultes.
J’ai abouti à ces formes arrondies et circulaires en m’inspirant de « La Vague » du peintre Hokusai et de l’univers du réalisateur Hayao Miyazaki, à qui l’on doit des dessins animés d’une grande poésie. La couleur rose fait, quant à elle, référence aux parterres de phlox que l’on trouve aux abords du lac Motosu, en plus de s’accorder avec l’architecture colorée du bâtiment.
Ainsi le sol est rose. Mais aussi en béton drainant. Pourquoi ce choix ?
À la demande du Département, il fallait pouvoir récupérer les eaux pluviales, ce que permet justement le béton drainant. C’est un procédé vertueux d’infiltration, qui repose sur une pâte cimentaire sans sable, à travers laquelle l’eau peut passer, comme dans du papier. En dessous se trouve une couche drainante en grave (de 10/20 pour la taille des cailloux).
C’est cette grave qui fait le lien entre le sol de surface et la cuve de 300 m3 que nous avons installée après avoir démoli le bassin de stockage maçonné existant. Plutôt récent, le béton drainant est néanmoins une solution bien maîtrisée. Le vrai défi, pour nous, a surtout été d’obtenir la couleur rose.
En quoi ce béton coloré représentait-il un défi ?
Nous avions pour obligation de faire les travaux pendant les vacances d’été. Ce délai très court ne nous permettait pas de colorer dans la masse avec cinq couleurs différentes.
Nous nous sommes donc limités à une coloration médiane dans la masse, que nous avons ensuite minéralisée. Pour obtenir ce camaïeu de rose, il a fallu procéder à plusieurs essais.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans la mise en œuvre de ce béton ?
Elles ont tout d’abord concerné la météo. Car, s’il fait trop chaud lors du coulage, le béton drainant plisse. Ensuite, la centrale qui fabriquait le béton ne devait pas être trop éloignée du collège pour la bonne stabilité du produit et sa couleur. En effet, le rose peut s’altérer en cas de transport trop long.
Enfin, comme il n’y a pas de sable, le béton drainant n’est pas pompable. Il a donc fallu l’acheminer par camion dans des bennes, et le mettre en œuvre via des engins élévateurs et brouettes mécaniques.
Le béton drainant nécessite-t-il un entretien particulier ?
Oui. Chaque année, il faut nettoyer et aspirer le béton afin d’enlever les fines particules qui s’infiltrent dans les pores du béton et qui pourraient l’empêcher de bien drainer. Ce n’est pas compliqué, mais comme ici il y a le minéralisant, il faut veiller à ne pas endommager la couleur.
Les collégiens ont découvert leur nouvelle cour en septembre 2022. Quelles ont été les réactions ?
Globalement, tout le monde a été assez bluffé. Dans cette cour, il y a désormais une ambiance « suspendue », très dépaysante. Le corps enseignant a aussi constaté que les récréations étaient beaucoup plus calmes, et les élèves plus apaisés.