Une nouvelle origine de calcaire
Des pavés en béton construits à base d’un éco-matériau possédant des propriétés drainantes et qui permettent à présent de lutter contre les îlots de chaleur dans les grandes villes. Le projet Fresh Ecopavers, piloté par l’école d’ingénieurs spécialisée dans le BTP ESITC Caen, ne cesse d’étonner.
À l’origine, une idée simple : remplacer pour partie les graviers nécessaires à la construction de pavés en béton par des coquilles Saint-Jacques broyées issues de la pêche et de la conchyliculture, qui sont innombrables sur la côte normande. Le fait qu’elles contiennent du calcaire leur permet de remplacer le ciment.
Une formulation « magique »
Dès 2015, les laboratoires de recherche de l’ESITC ont fait breveter un premier type d’éco-pavé à base de coproduits coquilliers dont la formulation permet de laisser l’eau s’infiltrer naturellement dans les sols (parkings, places, trottoirs…), ce qui participe à la limitation et à la prévention des risques d’inondations en milieu urbain. Mais les ingénieurs normands ont décidé de pousser plus loin l’innovation, dans le cadre d’un programme financé par l’ADEME et les régions Normandie et Ile-de-France, et mené en partenariat avec l’Agence parisienne du climat et l’ESITC Paris.
« Nous avons lancé dès la fin de l’année 2020 une nouvelle étude technique en analysant les propriétés mécaniques et hydrothermiques des pavés drainants afin de rechercher leurs propriétés rafraîchissantes. Elle a abouti à une optimisation de la composition du béton, qui permet aux pavés de restituer la fraîcheur du sol en condition de forte chaleur par un effet de vaporisation de l’eau », explique le docteur Hamzé Karaky, enseignant-chercheur à l’ESITC Caen.
Bientôt testé à Paris
« Les tests ont pour l’instant eu lieu en laboratoire, avec un protocole expérimental unique qui permet de se positionner dans des conditions réelles. Le pavé optimisé a pour objectif de répondre aux deux principaux paramètres, à savoir le drainage de l’eau et l’effet rafraîchissant. Ces pavés développés ont donné des performances encourageantes, avec une porosité totale très élevée tout en gardant des performances mécaniques acceptables vis-à-vis de la norme en vigueur », explique Hamzé Karaky.
Pour la suite, l’ESITC Caen a la charge de suivre in-situ les performances, en termes d’îlot de chaleur, de deux grands chantiers expérimentaux (Caen et Alençon) sur plusieurs mètres carrés. Ces tests en conditions réelles ont déjà commencé, mais les résultats ne sont pas encore connus.
Pour ces essais, les pavés seront équipés de capteurs afin de mesurer la quantité d’eau qu’ils contiennent, la capacité à la restituer, le débit et la température.
Les sites visés pour l’utilisation des éco-pavés se trouvent surtout dans les centres-villes des grandes agglomérations, là où le phénomène d’îlots de chaleur est le plus présent : parkings, pistes cyclables, parvis…
Un test sera d’ailleurs mené à Paris à la fin du cycle d’expérimentation, en 2022. Si les résultats sont concluants, le prototype sera breveté et commercialisé dans la foulée.