Le parcours de Paolo Giordano est atypique. Photographe, il expose ses photomontages à Venise ou New York, et collabore aussi avec des revues italiennes et internationales de design et d’architecture, comme Abitare, Casa Vogue ou Elle Déco. Une activité qui lui fait découvrir le design. Dans les années 1990, c’est décidé ! Il se lance et ouvre sa propre société de design, « I+I ». Dans une ville d’art et d’avant-garde par excellence : Milan.
Paolo Giordano, quels ont été vos débuts ?
Je suis diplômé en architecture de l’Ecole polytechnique de Milan, mais je n’ai jamais exercé en tant qu’architecte parce que ma passion était la photographie. J’ai donc travaillé comme photographe jusque dans les années 1990, avant d’entreprendre l’aventure « I+I » : un projet d’objets et de tissus contemporains au design minimaliste, réalisés en Inde et au Népal. En 2008, je me suis orienté vers des projets de niche, influencés par mon travail créatif et mes photographies. Il y a souvent des points de contact entre ces deux activités.
Comment est venue l’envie de travailler le béton ?
J’ai toujours eu en tête l’idée de travailler le béton. L’occasion est née quand j’ai décidé d’introduire de petites sculptures dans mes collections. Avec son aspect dépouillé, où chaque détail est visible, sa plasticité et la référence directe à l’architecture moderne, le béton s’est avéré être la solution juste, le matériau idéal pour les réaliser. L’accueil du public et de la critique a été très positif.
Je crois que dans le design, il mérite une place de choix pour sa particularité : il est plastique, minimal, opaque et résistant. Personnellement, je ne le mélangerais jamais avec d’autres matériaux, en particulier des matériaux métalliques.
Quelle place occupent la sculpture et l’architecture dans votre travail de photographe et de designer ?
Ce sont deux éléments permanents dans mes projets. Autant l’architecture classique que contemporaine, et la sculpture moderne en général. Mes sources d’inspiration sont le plus souvent « auto-référencées » : mon travail de designer s’inspire souvent de mes photographies, que je manipule dans des photomontages, et vice-versa.
Vénus, Hermès, sont des sculptures-objets en béton ?
Vénus et Hermès sont deux sculptures réalisées en versions marbre et béton. Toutes deux font partie d’un travail photographique Une journée digitale dans le Classique, qui manipule, découpe et tord les canons grecs et romains de la beauté classique. Les visages de Vénus et Hermès sont composés de trois pièces de béton qui peuvent être superposées ou juxtaposées.
C’est la façon dont je gère un héritage encombrant pour ceux qui, comme moi, ne recherchent plus l’équilibre et la perfection de la forme, mais regardent encore le passé comme une immense source d’inspiration.
« Chandigarh », un hommage au Corbusier ?
La ville de Chandigarh fut l’une de mes premières missions photographiques en Inde, dans les années 1990. J’ai imaginé une collection de vases en béton apparent, coloré avec les oxydes qui donnent à la matière des tons pastel et crayeux. Ces petites structures, petites architectures vibrantes et poétiques, peuvent être utilisées comme vases, mais aussi laissées nues telles quelles.
« Tre Torri », architecture ou puzzle ?
Tre Torri est une autre ligne de vases. C’est un ensembre architectural minimaliste en béton, composé de trois tours de différentes hauteurs inscrites dans une base initialement carrée mais dont les éléments sont modulables à l’infini : juxtaposables et placés en ligne, en croix. Un ensemble ludique qui fait participer le spectateur à un projet de micro-architecture. Ici aussi, les couleurs sont oxydées pour obtenir un effet crayeux.
Avez-vous d’autres projets en béton ?
En ce moment je réalise deux tables en béton pour un hôtel de Rome, avec le bureau d’études de Patricia Urquiola, qui sont des variantes de ma sculpture Vénus. Je vais certainement continuer à utiliser le béton dans mon travail.