Un pélerin du béton
Frédérick Gautier est un artiste et un céramiste du béton. Il signe ses œuvres du monogramme « FCK », qui est l’abréviation de son prénom mais aussi une unité de résistance du béton. Ce monogramme est riche de sens pour un designer qui a la passion du béton et fait le tour des hauts lieux de l’histoire du béton en France.
Ses résidences d’artistes l’ont conduit de la Cité radieuse du Corbusier aux Magasins généraux dessinés par Louis Suquet au début des années 1930, un grand paquebot de béton posé sur les bords du Canal de l’Ourcq.
FCK a travaillé huit mois dans le bâtiment conçu par Oscar Niemeyer pour le siège du PCF et il a habité la Louise-Catherine, la péniche en ciment armé rénovée par le Corbusier. Pour lui, chaque résidence est une expérience intense : « Il faut travailler en synergie avec un espace. C’est une mise en danger d’arriver sur un lieu et d’avoir une idée. »
Une matière fétiche
Du béton, Frédérick aime la plasticité et les variations : aspect banché, irrégulier, texturé ou lisse. Pour ce fan du Bauhaus, c’est le matériau qui fait la ville. Le designer recherche la pureté et la fonctionnalité des formes : cylindre, cube, cône ou disque.
Ses « Théières Béton » sont un hommage à l’architecture qui inspire son œuvre. Les objets du quotidien – assiettes, théières, vases, claustras ou sièges – qu’il produit dans « l’urgence » avec un atelier mobile, sont numérotés, inventoriés et mis en scène sur les lieux mêmes de leur création.
Des performances qui génèrent une production abondante : 100 bittes d’amarrage aux Magasins généraux, 100 théières sur la péniche, 50 pièces de céramique pour l’exposition Tokonomas au siège du PCF ou encore 100 œuvres in situ en 2021 à Lille. Ses pièces de vaisselle en céramique imitent l’aspect du béton, les autres pièces sont réalisées en béton.
Les sièges du couvent des Dominicains
Sa dernière résidence s’est tenue, au printemps 2021, dans le couvent des frères dominicains de Lille : une évidence pour l’artiste, tant son œuvre entre en résonnance avec l’architecture brutaliste du couvent – construit par les architectes Pierre Pinsard et Neil Hutchinson dans les années 1960. Une sorte de « retraite » créative où FCK est arrivé avec ses outils et sa bétonnière. Pour les frères qui vont bientôt ouvrir leur parc au public, il a conçu des tabourets.
En plus d’une recherche technique et esthétique, il a mené avec eux une reflexion symbolique et imaginé un système de construction modulaire à empilement de cinq disques qui fait référence à la Trinité, à l’artisan et au corps humain. Les moules des sièges ont été réalisés par l’École nationale supérieure d’architecture et du paysage d’après ses prototypes.
Un calendrier chargé
FCK a du pain sur la planche ! Quatre expositions et la sortie d’un livre sur son œuvre dans les semaines qui viennent.
En avant-première, la galerie Mercier, 3 rue Dupont de l’Eure (75), dans le vingtième arrondissement de Paris, va exposer 200 pièces béton, céramique et brique, du 9 au 30 avril 2022.
Puis, de mai à juillet, trois expositions lilloises présenteront ses œuvres : 20 vases et un claustra de béton à la piscine de Roubaix ; 100 « outils pour se nourrir » à la galerie QSP de l’association Le fil rouge ; et 100 objets terre et béton in situ au couvent des Dominicains. D’autres projets de longue haleine sont à l’étude en Colombie et à Venise.
FCK Paysages concrets
Écrit par la journaliste Marie Godfrain, et publié par les éditions Actes Sud, le livre FCK Paysages concrets permet de découvrir un artiste et une œuvre riche. On peut aussi rencontrer FCK dans son atelier en Bourgogne, et il reçoit sur rendez-vous dans son showroom parisien. Toutes les informations sont sur son site.