Avec l’essor de l’archéologie préventive ces trente dernières années, le nombre d’objets issus des fouilles a considérablement augmenté. Pour répondre à l’enjeu de leur conservation, l’État a initié à partir du milieu des années 2000 la création d’un réseau de centres de conservation et d’études (CCE), des dépôts archéologiques « nouvelle génération » principalement destinés à stocker les collections et à les rendre accessibles aux chercheurs pour en favoriser l’étude, tout en fédérant les acteurs régionaux.
C’est un équipement de ce type qui a vu le jour en 2016 à Sélestat, ville frontière entre le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, au sein d’un quartier abritant déjà des équipements culturels à vocation régionale.
Trois fonctions : conservation, recherche et administration
Le bâtiment, qui abrite également les services de l’établissement public interdépartemental Archéologie Alsace, développe une surface de plus de 4 200 m2 sur trois niveaux.
Trois grandes fonctions – conservation, recherche et administration – se retrouvent dans le programme, qui accueille des zones de stockage des collections, des salles d’études et d’analyse, ainsi que des bureaux, auxquels s’ajoute un petit espace d’exposition et de conférences dédié au public.
Chacune de ces fonctions est logée dans l’une des trois “épines” du bâtiment que Raphaël Voinchet, fondateur de l’agence W-Architectures, a conçu « comme une projection d’un carreau de fouille – le lieu de travail de prédilection d’un archéologue ».
Composant avec la morphologie du site, sa matérialité reprend, à travers son parement de béton formulé avec des agrégats provenant du fleuve tout proche, les teintes foncées du Ried alsacien, la plaine alluvionnaire située entre le Rhin et les Vosges. Seul l’épiderme du parement est teinté, et l’application d’un bouche-pores – une “patine” légère en surface – laisse deviner sa texture.
Le béton pour garantir une conservation optimale
Au-delà de son usage esthétique et symbolique, le béton a également été employé par l’architecte pour garantir une conservation et une exploitation optimales des collections. Les zones de stockages devaient ainsi être à la fois en mesure de supporter de lourdes charges et de disposer d’une atmosphère aux caractéristiques thermiques et hydrométriques contrôlées.
Ces caractéristiques techniques ont pu être atteintes notamment grâce à la conception des planchers, dont le mode constructif par passes successives, et l’épaisseur (jusqu’à 45 cm), permet de garantir une déformation minimum de la structure tout en assurant une excellente inertie thermique.
Cette dernière est elle-même renforcée par la présence de voiles épais et d’une isolation réalisée par l’intérieur.
« Ces performances permettent de minimiser drastiquement les besoins de régulation et les apports extérieurs », poursuit Raphaël Voinchet. Si bien que le bâtiment, répondant aux normes des bâtiments basse consommation (BBC) est « quasiment passif » : il ne dispose pas de chaufferie, et les besoins de chaud et de froid sont assurés par une unique pompe à chaleur alimentée par la nappe phréatique.
Mis au service des 55 agents – dont 30 archéologues – travaillant sur le site, cet équipement a pu accueillir plus de 66 000 visiteurs depuis son ouverture le 15 octobre 2016.