Adossée à une butte entourée de végétation et coiffée de son imposante sur-toiture brise-soleil en lames de bois d’angélique, la Maison des Cultures et des Mémoires de Guyane a fière allure.
Situé au cœur de la commune de Rémire-Montjoly, près de Cayenne, l’édifice accueillera les archives de la collectivité territoriale de Guyane en septembre, après quatre ans de chantier et plus d’une décennie de genèse.
Faute de financements, le projet a failli ne jamais aboutir et il a fallu qu’à la suite d’une visite sur place, le ministre de la Culture de l’époque, Frédéric Mitterrand, le « sauve » en ajoutant à la mission initiale du bâtiment – la préservation des archives contemporaines (papier) – celles des archives muséales, principalement botaniques (papillons, reptiles empaillés…).
Le pari réussi d’une alliance béton-bois
Désignée dès 2009 au terme d’un concours restreint, l’agence D3 Architectes basée à Paris, Bordeaux et Lyon a fait le choix d’une architecture de type amazonienne, style qui s’est développé à partir des années 1980.
« Toutes les archives stockées sont mises à disposition du public et au service de l’histoire de la Guyane. Nous avons donc eu la volonté de créer un bâtiment reflétant l’identité culturelle du territoire, d’où la présence du bois et une esthétique organique qui dialogue avec la nature avoisinante », explique Olivier Charles, l’un des deux associés de D3.
Cette architecture vernaculaire a permis de répondre à la question de la contrainte climatique de ce petit bout de terre française en Amérique du Sud. « Pour contrer un soleil vertical qui tape très fort, nous avons adopté le principe du carbet, un toit à large débord utilisé depuis toujours par les autochtones pour mettre sous une ombre fraîche l’intégralité d’un bâtiment. »
Mais la préoccupation majeure a été celle de la conservation des archives déposées dans les 20 magasins de ce bâtiment de 9 500 m².
« Le vrai problème n’est pas tant la variation des températures, beaucoup plus faible qu’en métropole, que celui de l’humidité, fréquemment de 99 %. » Et c’est là qu’intervient le concept de « thermos », appellation donnée par l’agence D3 à ce procédé dont elle est « l’inventeur ».
Le concept de « thermos » grâce au béton
« Le cœur en béton de l’édifice est entouré par une paroi extérieure faite de deux couches en béton de 8 et 14 centimètres coulées en une fois qui prennent en sandwich un isolant en polyuréthane de 20 cm (procédé GBE), et par un voile intérieur porteur de 20 cm. Entre les deux, une galerie technique de 90 centimètres crée une lame d’air traitée par un double flux qui maintient la température et combat la déperdition calorique. Ce système permet de ne pas avoir à climatiser les magasins de 200 m² chacun. À l’inverse, le travail de déshumidification s’effectue à l’intérieur de la double peau, mais pas dans la galerie technique. Le volume d’air à traiter pour la déshumidification, très consommatrice d’énergie, est donc beaucoup moins important. »
Pour des raisons esthétiques et parce qu’elle protège davantage de la chaleur le béton extérieur, teint dans la masse, possède une couleur proche de la latérite, la terre rouge de Guyane.