Vos grands-parents, Aimé et Marguerite Maeght, étaient galeristes, éditeurs et mécènes. Comment est née cette fondation et pourquoi à Saint-Paul-de-Vence ?
Cette fondation est née d’un drame. Mes grands-parents venaient de perdre leur fils Bernard emporté par une leucémie et s’étaient retirés sur un terrain à Saint-Paul de Vence.
Pour dépasser leur douleur, Georges Braque leur conseilla d’entreprendre « quelque chose qui vous dépasse » : un lieu dédié à l’art moderne et contemporain ou leurs amis artistes pourraient venir travailler.
Aimé et Marguerite vont s’inspirer des grandes fondations d’art américaines qu’ils avaient visité aux États-Unis. Voilà l’origine de la fondation Maeght, première fondation française.
Comment s’est déroulée la construction ?
Les artistes ont tous participé. Artistes modernes, ils en avaient assez d’être exposés dans des hôtels particuliers et rêvaient de patios, de terrasses, de volumes blancs, et lumineux.
L’architecte catalan, Josep Lluís Sert a conçu un système de demi-voûtes en béton armé, qui permet à la lumière zénithale d’inonder les salles d’exposition. Il a respecté l’esprit des lieux et les restanques du terrain en pente. Au point que certains murs tournent autour des arbres. Il n’y en a eu que onze de coupés !
Les matériaux étaient d’une grande simplicité : pierres du terrain, terre cuite et béton. Les photographies de la construction montrent mon grand-père au pied des échafaudages. Les ouvriers au travail se passaient les seaux de béton qui était coulé au fur et à mesure.
Les murs de la Fondation sont constitués d’un cœur de brique réfractaire entouré d’un espace vide qui fait tampon d’air et d’une couche de béton brut qui conserve l’empreinte des nœuds du bois de coffrage.
On reconnait tout de suite le bâtiment aux deux grands voiles en impluvium de sa toiture en béton, y-a-t-il d’autres innovations dans l’architecture ?
L’ensemble de la Fondation est d’une incroyable modernité ! Ces deux impluviums récupèrent l’eau de pluie qui descend de bassin en bassin. En fin de parcours, elle est réinjectée par une pompe l’eau dans le premier bassin.
Quand on lui a demandé de poser des barrières de sécurité, Aimé a été clair « Apportez-moi le modèle de Versailles autour des bassins et je m’adapterai ! ». Autre exemple de modernité : les marches suspendues de l’escalier sont des dalles de ciment fichées dans le mur. C’est le premier escalier de béton fixé d’un seul côté. Dans le bâtiment, la température est toujours tempérée car on peut moduler le flux d’air en ouvrant ou fermant des vasistas.
Beaucoup d’architectes, comme Jean Nouvel qui est un grand ami de la Fondation, se rendent compte du nombre d’innovations.
La Fondation Maeght c’est aussi l’art des jardins ?
Ce jardin est une œuvre d’art, un musée de sculptures. Il comporte un labyrinthe de pierre conçu par Miró. Une ligne blanche qui serpente évoque le fil d’Ariane et conduit à l’Arc de Joan Miró : le Minotaure. Cette statue de trente tonnes est faite d’un béton très granuleux comportant beaucoup de gravier et des incrustations de plaques de pierres, d’ardoises et de verre de différentes couleurs.
L’artiste a scarifié le béton sec au marteau piqueur. La chapelle est un autre miracle de ce jardin. Mes grands-parents ont trouvé sur le terrain les ruines d’une ancienne chapelle dédiée à Saint Bernard, comme leur fils. Restaurée, elle accueille des solistes. Stockhausen et Chostakovitch lui ont trouvé une bonne acoustique.
Quels sont vos projets pour la Fondation Maeght ?
Aujourd’hui nous avons le projet d’agrandir la Fondation tout en respectant le projet initial de mes grands-parents. Trois phases de travaux sont prévues. Une première, confiée à l’architecte Sylvio d’Ascia, va créer de nouveaux espaces sous la cour Giacometti. Un concours sera organisé pour la seconde étape d’extension.
Enfin, à plus longue échéance, nous avons le projet de construire un théâtre.
Fondation Maeght
623 chemin des Gardettes
06570 Saint-Paul de Vence
France
+33 (0)4 93 32 81 63
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