Pierre Baey a fait ses premiers pas de céramiste dans l’atelier de Jean et Jacqueline Lerat, à l’école des Beaux-Arts de Bourges, en 1966-1967 – l’un des meilleurs ateliers de l’époque pour le grès. Il découvre le béton en 1980.
Depuis, de nombreuses expositions ont dévoilé son approche du matériau : dans son univers, la voiture croise le mythe antique (Retour à Ithaque, 1984), et Nefertiti (1998) rencontre La Dame d’Elche (1998) ; le béton lui permet également d’exprimer une vision plus politique (Free Afgan). Aujourd’hui, Pierre Baey travaille dans le Gard.
Que représente le béton pour vous ?
Le béton est devenu une solution pour moi, un copain. Plus de problème de dimension, je peux réaliser des pièces de six mètres de long sans coupure !
Comment travaillez-vous ?
Je ne dessine pas. Lorsque j’ai une idée, je la gribouille puis je la calcule de tête. Au besoin, pour des très grandes pièces, j’utilise deux points, un piquet et je trace par terre. J’ai réalisé un canon qui mesure 4 mètres de haut, j’ai réfléchi un mois avant de trouver la solution.
Pour moi, un objet détermine une dimension. Chacun a la sienne, une proportion juste avec la vision qu’on propose, qui permet d’aboutir à quelque chose de logique. Je travaille en fonction de mes idées… et elles sont imprévisibles.
Une idée en amène une autre. Je sais qu’une œuvre est achevée quand je me suis arrêté à temps.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Elles sont nombreuses, l’Égypte antique et la Grèce par exemple. Je me souviens d’une visite au Louvre avec ma classe quand j’avais une dizaine d’années.
Une œuvre en particulier m’avait fasciné : une cuillère à fard dont le manche figurait une nageuse et la cuillère, la forme parfaite d’un demi-œuf.
Mon travail est figuratif, et mes sujets sont toujours différents. Toutes mes œuvres ont une raison d’exister. J’ai mis la même énergie, la même volonté pour toutes, et toutes ont créé une histoire qui m’a plu.
Quel est votre regard sur le monde ?
Le monde est bien moins excitant que les quatre saisons.
Et votre idée de la mission de l’artiste ?
Tout sauf un missionnaire !
Vos premières pièces en béton ?
J’ai récupéré un jour dans une décharge une base en ciment de 2 mètres, utilisée pour ficher les poteaux de béton.
Mi-récupération mi-construction, un assemblage inspiré de l’Égypte antique et de l’art industriel a vu le jour (Site, 1983).
Une autre de mes œuvres, Canope (1999), était une sorte de grande rappe de six mètres de longueur avec des personnages.
Des sculptures et quelques sièges en béton ?
Un jour, en sortant du musée d’Arles, je me suis assis sur un banc tellement inconfortable que j’ai décidé d’en créer un. J’ai changé les dimensions et conçu un siège avec un très haut dossier car « il faut bien poser son cul pour bien poser sa tête ».
Pour la faculté de Droit, à Rouen, j’ai imaginé trois méridiennes et des fauteuils en béton noir, épais de onze centimètres et pesant 600 kg.
Vos derniers travaux ?
Quatre pièces nouvelles pour une exposition dans le Gard. Elle a été longtemps retardée par la Covid-19 et se tient depuis le 1er juillet dans le petit village de Montignargues, au sud de Nîmes. Nous serons plusieurs à exposer dans un espace de 700 m2.