Quel est le concept de Bobun design ?
Laurene Hombek : Bobun, c’est une ligne de meubles recouverts de mortier coloré, des calebasses de béton, des coupes et de fines coquilles de ciment. Des formes qui invitent à entrer en contact avec l’objet et qui ont un rapport primordial au toucher. J’aime être au carrefour des cultures : je suis autant inspirée par la tradition japonaise que par l’Afrique ou les artistes minimalistes pour lesquels “Less is more”.
Quels ont été vos premiers contacts avec le béton ?
L. H. : En 2005, tout juste diplômée de l’école supérieure des Beaux-arts de Montpellier, j’ai été recrutée par une société pour réaliser des meubles en béton. Déjà rodée aux techniques traditionnelles du modelage de la terre, du moulage et du coulage du plâtre, j’ai suivi un stage de formation aux techniques du mortier décoratif que proposait un fournisseur. J’ai ressenti la même émotion que pour mes premiers tirages en plâtre. Mais, là où le plâtre était blanc, fragile et trop lisse, j’ai été séduite par le béton pour sa robustesse, sa sobriété, sa minéralité, l’immédiateté de son coulage et son aspect mat.
Vous avez donc vécu cela comme un déclic ?
L. H. : Oui. Après cette première expérience, j’ai voulu créer mon atelier et lancer ma propre collection d’objets décoratifs en béton. Bobun est né en 2010. D’abord dans un tout petit local à Aigues-Mortes, puis au Grau-du Roi, et depuis peu à Montpellier dans un ancien garage. Je tiens au caractère artisanal de mon travail, produisant essentiellement des pièces uniques et des séries très limitées. En 2012, j’ai intégré la pépinière des Ateliers d’Art de France, qui est à l’origine du salon Maison & Objet – où mes pièces sont présentées dans l’espace Craft, dédié aux jeunes créateurs.
Dans quelle mesure le béton est-il un matériau propice à la créativité ?
L. H. : Je choisis des bétons auto-lissants conçus pour les sols, ainsi que des enduits techniques enrichis d’adjuvants et de résines qui les rendent très performants. Teintés dans la masse, ils gagnent de la profondeur et des couleurs vibrantes. Mes mortiers contiennent de la silice et différents ciments. Plus souples, ils me permettent de très fines épaisseurs.
J’utilise une technique mixant coulage et modelage, et je profite du temps de séchage pour travailler des textures lisses, granuleuses ou veinées. Le béton est une matière très fidèle au dispositif dans lequel on la contraint. Après l’étape du polissage, j’applique des cires qui subliment les couleurs. J’ai obtenu des verts métalliques proches du bronze, des noirs, des gris très foncés, des blancs qui évoquent la nacre… Le béton change de nature.
Un conseil pour ceux qui découvrent le béton ?
LH : Il faut prendre le temps de l’expérience, le temps de la découverte pure ! En ce moment, mes recherches portent sur la technique du Raku : les céramistes arrivent à des textures incroyables et je travaille sur cet aspect radical du feu. J’aime tester la résistance de la matière, les dosages…, passer de la recette purement technique à l’expérimentation. C’est la magie des tâtonnements et des premiers essais : un processus expérimental jusqu’à la surprise. On sait pourquoi on a passé du temps avant. Je rêve à l’effet de matière que je n’aurais jamais recherché !