Pérenniser la biodiversité marine
Dans le Golfe d’Ajaccio, au large de la plage du Ricanto, les fonds vaso-sablonneux accueillent depuis l’été 2017 de nouveaux récifs artificiels, pour abriter la faune et favoriser le repeuplement.
Le choix est stratégique, puisqu’il « correspond à une demande de la prud’homie des pêcheurs d’Ajaccio, la plus importante de l’Ile, et qu’il est situé dans l’estuaire de deux fleuves, riches en sédiments et donc en nutriments pour les poissons, mais aussi à proximité immédiate de l’aéroport. Il bénéficie d’une protection, avec notamment interdiction de pêche », précise Alexandra Agostini Nardini, responsable du programme à l’Office de l’Environnement de la Corse, le maître d’ouvrage.
Une expérimentation de 3 ans
Ce projet expérimental est mené sur trois ans, en totale concertation avec les usagers (pêcheurs, apnéistes, etc.). Il porte sur trois types de récifs artificiels, recourant à des formes et à des matériaux différents : rocher en béton, croix en métal, grillage en métal souple avec un faible courant électrique. Il s’agira de procéder à des comptages, afin de constater quel récif est colonisé, et par quelles espèces. En effet, les poissons et autres crustacés ont chacun leur type d’habitat.
Un biomimétisme parfait avec le béton
Le récif artificiel en béton est une première : le coffrage permet de reproduire très fidèlement l’état de surface d’une roche naturelle pour aboutir à une pièce de 2,5 tonnes et de 6 m².
« Nous sommes partis de la réalité du terrain, de ce que nous trouvons dans la nature, les failles, trous, bosses, que les poissons affectionnent et où ils viennent se réfugier. Nous faisons de la recherche opérationnelle et appliquée », explique Jean-Claude Souche, ingénieur maritime, docteur en génie civil, et enseignant chercheur à l’École des Mines d’Alès, plongeur et apnéiste lui-même.
Ces “roches artificielles” ont un avantage par rapport à d’autres structures classiques : « Le biomimétisme est tel qu’elles se fondent dans le paysage sous-marin, car elles se colonisent aisément par des macro-algues », ajoute-t-il.
Une solution simple et durable
Par ailleurs, la plasticité et la durabilité des bétons permettent leur utilisation dans des milieux jugés extrêmes, comme les fonds marins. Après de très nombreux tests et recherches sur la qualité du béton à employer, le choix s’est porté sur une solution assez classique, du béton marin(1), donc facile à mettre en œuvre, à un coût maîtrisé. Il est également armé, pour une question de résistance, de masse et de pérennité.
« Si les résultats sont positifs et encourageants pour la ressource halieutique, cette expérience permettra d’étendre le dispositif à une zone plus importante, reprend Alexandra Agostini Nardini. Fin mai, on effectuera une première campagne de suivi écologique (comptages ichtyologiques, suivi de la faune et de la flore fixées, analyses sédimentaires). On aura donc de premières indications sur le succès de l’opération. »
(1) Béton employé pour les ouvrages en site maritime, formulé avec un ciment PM (Prise Mer) de façon à résister à de multiples agressions (mécaniques, chimiques, climatiques…).