Vous travaillez actuellement sur la rénovation des bains-douches de la Butte aux Cailles, après avoir réhabilité la piscine attenante. Quelle est l’histoire de ce projet et quels sont ses enjeux ?
C’est la découverte d’une nappe d’eau chaude souterraine, en 1866, qui est à l’origine de la construction des bains-douches en 1908. Puis, de 1922 à 1924, l’architecte Louis Bonnier a réalisé une piscine, en recourant aux systèmes constructifs en béton armé que venait d’inventer François Hennebique.
L’établissement offre ainsi deux approches architecturales : la façade sur rue, tout en courbes et en briques rouges, évoque un style régionaliste ; et à l’arrière, une impressionnante voûte soutenue par sept arches de béton armé et ornée de trois espaces circulaires incrustés de pavés de verre incarne l’architecture moderne.
Au fil des années, la piscine avait perdu de son lustre sans parler des normes obsolètes en termes de confort, d’énergie et d’accessibilité.
Quel a été le projet de TNA ?
Outre les aspects techniques, comme la ventilation double flux, la maîtrise de l’hygrométrie ou encore l’isolation acoustique, le programme prévoyait la réhabilitation des intérieurs à l’exception de l’accueil. Nous avons voulu restituer la perception sobre et fonctionnelle du projet d’origine : couleurs monochromes des revêtements de la halle bassin, rééquilibrage des lumières naturelles et artificielles, remise en valeur des vestiaires dans leur esprit initial, réparation de la voûte en béton et du bassin.
C’était un édifice en béton, et il n’était pas question de remettre en cause le matériau ni le mode constructif, qui sont encore utilisés aujourd’hui pour les centres aquatiques.
Y a-t-il eu de gros travaux ?
C’est dans la halle bassin que les interventions ont été les plus nombreuses, en raison de l’oxydation due aux ambiances chlorées sur des voiles béton assez minces : reprise du bassin proprement dit ; mise à nu des zones abimées ; reconstitution de certaines poutres en béton soutenant les voûtes latérales ; renforcement des trois voûtes circulaires en comble par l’ajout d’armatures, la création de chevêtres, le remplacement des pavés de verre refaits à l’identique, et le ré-enrobage de béton blanc coulé en place à 15 m de hauteur.
Quel est l’intérêt du béton pour de tels centres aquatiques ?
Les propriétés du béton lui valent de résoudre les problématiques techniques de fondation, de structure, d’étanchéité des bassins. Comme c’est un matériau inerte, il résiste bien aux agressions chimiques en milieux humides, notamment au phénomène de carbonatation dû aux eaux chlorées.
Concernant la piscine de la Butte aux Cailles, sa durabilité a ainsi permis d’éviter la démolition complète, même si des réparations ponctuelles se sont imposées – ce qui est bien compréhensible après quasiment un siècle d’exploitation. Enfin, le béton a des qualités plastiques qui autorisent une expression sculpturale, comme le montrent les portiques en plein-cintre.