Quel périmètre couvrait la réhabilitation du siège social du Crédit Agricole Centre France ?
La rénovation concernait un îlot entier de six bâtiments dessinés et construits entre 1956 et 1974 par Valentin Vigneron. Disciple d’Auguste Perret, cet architecte a marqué de son empreinte la ville de Clermont-Ferrand, en y amenant notamment la brique, le béton et le blanc. Après 2015, ayant pu racheter leurs lots aux autres propriétaires du lieu (principalement, la Mutualité Sociale Agricole et la Chambre d’agriculture), le Crédit Agricole Centre France, qui y occupait jusque-là trois immeubles, a décidé de s’y agrandir. Seulement, l’ensemble était à la fois hétéroclite, fortement dégradé et très sale. Un appel d’offres a été lancé en 2017 pour une réhabilitation lourde, que nous avons remporté l’année suivante.
Quelle a été votre approche architecturale ?
Notre premier réflexe a été de respecter les façades sur rue, tramées en béton, qui sont en passe d’être labellisées Architecture contemporaine remarquable. En revanche, à l’intérieur, nous nous sommes autorisés à faire ce que nous voulions. Côté cour, nous avons créé un jardin pour les collaborateurs et imaginé une grande façade cadre entièrement vitrée. Sur les sept étages, nous avons raccordé tous les niveaux et refait des plateaux tertiaires en continu. L’entrée a été positionnée à l’angle des avenues Libération et François Mitterrand : elle donne sur un hall monumental, avec un grand atrium autour duquel ont été répartis l’essentiel des salles de réunions et un amphithéâtre.
À l’exception de cette nouvelle entrée, vous n’avez fait aucune autre modification sur les façades côté rue ?
Non. En revanche, nous les avons nettoyées. Nous avons aussi dû effectuer quelques réparations ponctuelles sur des bétons bouchardés, cannelés ou sciés, et construire de nouveaux ouvrages là il y en avait besoin. Un grand nombre d’encadrements de fenêtres en béton blanc ont été refaits, par exemple. À chaque fois, nous avons recherché les formulations de l’époque, de quelles carrières provenaient les granulats, et avons réalisé des essais sous le contrôle de l’ABF (corps des architectes des Bâtiments de France, NDLR). Nous avons même retrouvé un émailleur du Puy-de-Dôme, afin de lui faire refaire des panneaux émaillés qui avaient été démolis.
« Notre premier réflexe a été de respecter les façades sur rue, tramées en béton, qui sont en passe d’être labellisées Architecture contemporaine remarquable. En revanche, à l’intérieur, nous nous sommes autorisés à faire ce que nous voulions. »
Cyril Bourmeyster,
architecte associé chez SOHO Architecture
Comment avez-vous stabilisé les façades derrière lesquelles vous avez construit le nouvel immeuble ?
Nous avons mis des butons en pied et en tête, ce qui a nécessité la réalisation d’appuis de fondation. Notre premier chantier, qui s’est étalé sur un an, a donc consisté à forer un millier de micro pieux dans les sous-sols du bâtiment existant. La ligne de fondation créée pour nos butons est devenue celle de la première ligne de poteaux intérieurs, en béton armé, du nouvel immeuble.
Vous avez aussi eu recours à du béton haute performance…
Nous avons effectivement quelques poteaux en béton haute performance dans le hall d’accueil, ce qui a permis de les affiner. Ce sont des poteaux ronds que nous avons gardés bruts de décoffrage : ils sont naturellement polis, brillants et homogènes. À son époque, Valentin Vigneron utilisait ce qu’il y avait de mieux en matière de béton ; nous avons essayé de nous inscrire dans l’histoire de ce patrimoine en faisant de même aujourd’hui.
Quel bilan faites-vous de cette réhabilitation ?
Ce type de réhabilitation est rare, et nous avons eu la chance d’être accompagnés tout au long de ce projet par un maître d’ouvrage qui avait une vraie vision et l’envie de s’inscrire dans le tissu urbain de la ville.