Il y a quelques années, la Fondation Pierre Fabre a annoncé sa volonté de doter son siège social, à Lavaur (Tarn), d’un nouveau bâtiment administratif et évènementiel de 1105 m².
Quand l’agence Oeco a commencé à élaborer sa réponse, une idée s’est imposée : édifier les murs de façade à partir de terre extraite du chantier, grâce à du béton de terre de site – dans lequel une partie des granulats et du sable sont remplacés par cette matière.
« La construction en terre est une manière de bâtir ancestrale qui existe à travers le monde entier, explique Claire Furlan, architecte associée chez Oeco. Des modes constructifs en terre sont traditionnellement utilisés dans les pays où la Fondation intervient, l’idée étant de créer un lien entre les cultures, à l’image de ce que fait cette dernière par la promotion des valeurs d’entraide et de santé. »
Outre cet aspect symbolique, le matériau terre, que cela soit sous la forme de béton de terre de site mais également de briques de terre crue compressées, a séduit pour des raisons environnementales (possibilité de valoriser une ressource locale et renouvelable) et esthétiques (un matériau brut et rugueux qui contraste avec la matérialité plus lisse du bâtiment).
Des études complexes pour une mise en œuvre inédite
Dans la mesure où la réalisation de murs en béton de terre n’est pas une technique normalisée, les acteurs du projet ont dû justifier leur parti pris en caractérisant la terre de site.
Par ailleurs, la sensibilité à l’eau du matériau a nécessité des adaptations architecturales, avec notamment l’ajout de débords de toiture et d’une talonnette en béton de ciment au niveau du sol.
« Nous avons pris ces contraintes comme point de départ pour la conception volumétrique du bâtiment », indique Claire Furlan.
S’agissant de la formulation, le principal enjeu a consisté à concilier le principe d’une utilisation maximale de la terre extraite avec l’atteinte des caractéristiques mécaniques attendues.
« Dans la solution retenue, le dosage en ciment (240 kg/m3) permet d’incorporer 60 % de terre en masse sèche, ce qui est un taux inédit pour la France métropolitaine », souligne Pierre Caubère, ingénieur structure pour le bureau d’études TPFI.
Même si le coulage s’effectue comme pour un béton classique, la phase d’exécution a réservé son lot de défis.
À titre d’exemple, les essais en phase chantier ont mis en évidence un retrait trois fois plus élevé qu’avec un matériau courant.
D’où la décision de séparer les linéaires des murs en plusieurs tranches reliées par un clavetage afin de minimiser un éventuel phénomène de fissuration.
Un bilan très positif
Que retenir du chantier de la Fondation Pierre Fabre ?
« L’expérience a permis d’enrichir les approches techniques et de faire avancer nos filières géosourcées en diminuant l’impact du projet sur les ressources naturelles », résume Pierre Caubère.
« Nous avons une idée assez claire des pistes d’amélioration pour l’usage du béton de terre de site, complète Claire Furlan. Il s’agira notamment de réduire les exigences de stabilité structurelle et de bien identifier les modes justificatifs les plus adaptés. »