Pouvez-nous rappeler les exigences de construction de cette école ?
Adrian Garcin : L’Établissement Public d’Aménagement Euroméditerranée souhaitait construire un nouvel ensemble scolaire derrière les tours CGM et La Marseillaise, afin de remplacer l’ancienne école du quartier et faciliter l’arrivée de nouveaux riverains.
Totalisant 3 720 m² de surface de plancher sur 3 niveaux, cette école devait accueillir 8 classes maternelles et 14 classes élémentaires, avec deux cours de récréation séparées, une entrée et des locaux communs.
Sa construction, à la périphérie d’un quartier dense et populaire de Marseille, s’est également inscrite dans une ambition environnementale très forte, avec un objectif de labellisation E+C-.
Quels ont été votre ambition et vos choix architecturaux face à ces enjeux ?
Adrian Garcin : Compte tenu des critères environnementaux à respecter et de son implantation, nous avons opté pour une architecture méditerranéenne bioclimatique.
D’allure monolithique, le bâtiment se veut à la fois résolument minéral et solide, mais aussi aérien avec des colonnades qui jouent avec la course du soleil.
Massives, les façades ont un rôle protecteur pour les enfants et leur béton clair, parfois sablé, rappelle la pierre calcaire locale.
Les embrasures des fenêtres, ainsi que la réinterprétation des moucharabiehs proposent un jeu d’ombres et de lumière, tandis que le dessin de l’escalier ajouré côté rue et les sheds de toitures en formes de vagues finissent de déstructurer l’ensemble.
Contrastant avec l’enveloppe du bâtiment, les intérieurs des classes et des circulations, colorés ou parés de bois, apportent, quant à eux, de la douceur et de la chaleur.
Comment avez-vous mis en œuvre les principes de l’architecture bioclimatique, avec quelles solutions ?
Adrian Garcin : Chaque façade a été adaptée à son exposition, avec de grands pans protecteurs du mistral au nord, des embrasures au sud et à l’est qui mettent les vitrages en retrait, et des vitrages généreux sur les cours.
Les façades, d’une épaisseur d’un mètre, ont été réalisées avec le procédé GBE, par le coulage simultané de deux voiles de béton entre lesquels s’intercale un isolant.
Cette épaisseur a permis l’installation d’embrasures inclinées faisant entrer la lumière tout en protégeant des rayons néfastes.
À chaque niveau, les planchers chauffants-rafraichissants sont raccordés à une station de géothermie marine locale, tandis qu’un système de ventilation naturelle nocturne assure la fraîcheur le matin.
Le nombre de composants architecturaux et techniques a enfin été volontairement limité, avec une utilisation massive de béton bas carbone.
Cette conception bioclimatique très aboutie créée, au final, de l’inertie et du confort thermique hiver comme été, en réduisant l’empreinte carbone du bâtiment.
En quoi le béton est-il bas carbone et comment s’est faite sa mise en œuvre ?
Adrian Garcin : Une partie des ciments a été remplacée par des laitiers issus des hauts-fourneaux de Fos-sur-Mer.
Cette valorisation a permis de réduire le bilan carbone des bétons. Les sables et granulats provenaient de carrières à proximité, et le béton a pu être réalisé dans une centrale installée sur place. Les composants locaux utilisés pour la fabrication du béton nous ont aussi permis d’obtenir une teinte pierre, entre le blanc nacré et le beige, sans colorant ni adjuvant.
Au total, 5 100 m³ de béton ont été coulés sur place pour les fondations, les façades, les cours, les planchers et la toiture.
En plus d’être résistant et durable, ce béton, resté brut sans revêtement extérieur ni faux plafond, assure l’inertie thermique du bâtiment tout en lui faisant bénéficier des meilleures performances environnementales.
Quel bilan peut-on dresser maintenant que le projet a été livré ?
Adrian Garcin : Ce bâtiment a obtenu le niveau E3C1, conforme à la RE2020, mais c’est aussi la première école labellisée Bâtiment durable méditerranéen (BDM) niveau argent à Marseille.
Cette labellisation a été rendue possible grâce à l’utilisation du béton bas carbone et d’éco-matériaux, à la géothermie marine et à l’utilisation du BIM, de la conception à la réalisation.
Livrée en janvier 2021, l’école a reçu ses premiers élèves et enseignants qui profitent du confort thermique des espaces intérieurs et de la cour en R+2 offrant un point de vue exceptionnel sur le port de Marseille et la mer.
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