Comment expliquez-vous la popularité du tramway ?
Armand Joly : Au début du XXe siècle, toutes les villes avaient un tramway, mais elles l’ont fait disparaître dans les années 1950 parce que la voiture est devenue le mode de transport le plus moderne. Le retour en grâce du tramway a commencé il y a plus d’une vingtaine d’années.
C’est le moment où les villes se sont repensées et ont voulu donner la priorité aux espaces verts, à la mobilité et à la réduction de la pollution. Le tramway est une solution d’autant plus intéressante qu’il transporte en moyenne trois fois plus de passagers que le bus.
En quoi le béton est-il un support adapté au tramway ?
A. J. : Les structures en béton sont celles qui répondent le mieux aux contraintes de circulation du tramway. Elles réduisent les vibrations et le bruit, et sont très résistantes. Prenons l’exemple de la dalle de finition, dans laquelle les rails du tramway sont scellés. Elle peut avoir une résistance en traction par fendage de 3,3 MPa (2) dans les zones les plus sollicitées, ce qui équivaut à une résistance à la compression de 40 MPa, proche des bétons les plus solides, qui se situent juste avant la catégorie de ceux à hautes performances (BHP).
Le béton est par ailleurs homogène et peut prendre n’importe quelle forme. Il n’a pas besoin d’être compacté comme les enrobés. Cela facilite l’intégration de technologies comme les boucles magnétiques. Il est beaucoup plus simple de les couler dans le béton que de les insérer dans des enrobés qui sont appliqués à chaud et qui doivent être compactés.
Le béton est également insensible au fluage ou à l’orniérage, il est aussi durable, non-dérapant et esthétique. En lui donnant une couleur, il devient possible d’agrémenter un parcours ou d’identifier clairement une zone.
L’équation économique n’est-elle pas défavorable au béton ?
A. J. : L’investissement initial est effectivement plus important pour une solution béton plutôt qu’une solution enrobé. Mais il faut bien se rappeler que le béton ne nécessitera que très peu d’entretien pendant toute sa durée de vie, contrairement aux autres solutions. C’est pour cela que les collectivités investissant dans une infrastructure de tramway le privilégient pour toutes les zones fortement sollicitées et répondant à de forts enjeux esthétiques.
Celles qui choisissent les revêtements en enrobés doivent parfois consentir rapidement de lourds investissements de rénovation en raison du fluage et de l’orniérage, en cas de trafic intense et de températures élevées.
En quoi la R&D peut-elle permettre de répondre aux enjeux des collectivités ?
A. J. : Les recherches les plus récentes ont pour but de créer des bétons qui soient à la fois drainants, circulables et décoratifs. Cela permettrait aux collectivités de « désimperméabiliser » les sols, en particulier dans les zones urbaines.
Elles pourraient ainsi réduire les conséquences de fortes pluies qui peuvent engorger les réseaux d’évacuation, envoyer la pollution vers les cours d’eau et causer des dégâts très importants. La réglementation va d’ailleurs clairement dans ce sens.
(1) Spécialistes de la chaussée en béton et des aménagements
(2) Mégapascal