Enfilade de portiques en béton
Construite à la fin des années cinquante par l’architecte Claude Fay, l’église des Fontaines d’Ugine (73) a été désacralisée et cédée à la commune en 2003.
Ce lieu de culte, érigé près des aciéries, l’architecte l’avait voulu simple et contemporain, avec son enfilade d’arches de béton qui s’élèvent jusqu’à la clef de voûte. L’économie de matière avait aussi dicté sa conception et sa construction, avec une architecture basique mais efficiente, l’usage d’un seul coffrage pour le coulage des sept portiques en béton armé, et des matériaux naturels — ciment, bois, terre cuite, briques — sourcés localement.
Lors de la cession de l’église, la paroisse et la ville s’étaient accordées sur la vocation culturelle ou sociale à venir de l’édifice. C’est une reconversion en centre d’art contemporain qui a été décidée en 2017.
Béton brut de décoffrage
Pour ce projet, la jeune agence d’architectes Lis & Daneau s’est reposée sur la structure originelle en béton.
« Nous avons souhaité préserver la simplicité et la clarté du parti pris de l’architecte en nous servant des solides portiques pour la transformation du lieu et en ouvrant simplement sa façade sur la rue », explique François Lis, associé fondateur du cabinet Lis & Daneau.
Laissées brut de décoffrage, comme les pannes sablières qui traversent l’édifice, ces arches entrent aussi en résonance avec la nouvelle vocation du lieu.
Déjà soutenue par un linteau de béton, la partie basse de la façade, réalisée avec des boisseaux en terre cuite, a cédé la place à des baies vitrées.
Entièrement vidée et préservée, la nef, dont les lambris sous-charpentes ont été repeints, a été reconvertie en espace d’exposition. L’ancienne sacristie a, quant à elle, été transformée en atelier et l’autel en béton, en partie recyclé.
Réversibilité du béton
Le cabinet d’architecte s’est aussi associé à un bureau d’études acoustique pour atténuer la réverbération du lieu. La solution repose sur la mise en place d’un immense volume de 20 mètres de long sur 8 de large, suspendu à 3 mètres du sol. Cette structure, constituée de caissons en sapin contrecollé habillés de coton, sert à la fois à l’éclairage, au chauffage et au traitement acoustique de la nef, mais aussi à l’accrochage des œuvres d’art, grâce à des câbles lestés de carottes en béton issues de l’autel démoli.
« Notre projet s’est attaché à valoriser la culture architecturale et constructive mise en œuvre à l’époque, en s’appuyant sur la structure béton capable de supporter notre nouveau dispositif, conclut François Lis. Résistant, durable et contemporain, le béton a aussi montré sa réversibilité d’usage. »
Depuis son ouverture en septembre 2019, le Centre d’art et de rencontres Curiox a déjà accueilli plusieurs artistes en résidence et de nouveaux projets sont en cours.