750°C vs 1450°C
L’utilisation d’argiles calcinées à la place du clinker pour réaliser du ciment est une solution éprouvée depuis plusieurs années pour faire baisser le bilan carbone du matériau, les températures de cuisson étant différentes (750 °C pour l’argile, 1 450 °C pour le clinker).
Mais là où, dans le procédé actuel, l’argile issue de carrières est pure, le projet européen CO2Redres se différencie par la récupération d’argiles issues de boues de lavage des granulats, voire de déblais.
Coopération interdisciplinaire et transfrontalière
Financé à hauteur de 60% par le programme européen Interreg Grand Région, ce projet sur deux ans associe les universités d’une même zone géographique, celles de Lorraine (France), du Luxembourg, de Liège (Belgique) et de Trèves (Allemagne).
« Nous avions déjà travaillé sur le recyclage du ciment avec nos collègues de ces régions. Nous voulions continuer cette coopération transfrontalière », indique Romain Trauchessec, chercheur de l’équipe Matériaux pour le génie civil de l’Institut Jean Lamour à Nancy (laboratoire du CNRS et de l’Université de Lorraine).
Des cimentiers des pays concernés participent également à ce projet. Ils fournissent des prélèvements d’argiles provenant de leurs carrières, mettent leurs moyens à disposition et donnent des recommandations.
Deux argiles prometteuses pour des bétons-tests
Débutée en juillet 2020, l’expérimentation a d’abord porté sur une quarantaine d’échantillons. « L’objectif est de vérifier que des argiles issues des boues de lavage ou de couches argileuses naturelles ont des caractéristiques pertinentes pour faire du ciment. Nous avons déjà fait des études en ce sens mais CO2Redres peut permettre de confirmer les résultats à plus grande échelle », explique Romain Trauchessec.
Au final, deux ressources argileuses prometteuses ont été retenues, et chaque université va faire réaliser par une cimenterie située sur son territoire des bétons-tests contenant 15% à 45% d’argiles calcinées et de fillers calcaires à la place du clinker.
Les chercheurs vont les comparer à des bétons réalisés avec du ciment CEM I, qui ne comporte que du clinker.
Un bilan carbone réduit de 30%
Les résultats finaux seront présentés en décembre 2022. Romain Trauchessec est optimiste : « Il faudra évaluer les caractéristiques mécaniques et aérologiques du béton, sa fluidité, sa maniabilité, sa résistance. Mais en fonction de la finesse de l’argile, nous avons bon espoir que certains bétons-tests soient tout à fait satisfaisants. »
Compte tenu de l’émission de carbone quatre fois plus faible produite lors de la cuisson de l’argile par rapport au clinker, la diminution du bilan carbone du ciment est d’environ 30 %. Une solution que les professionnels du béton étudieront de très près pour voir si elle peut être industrialisée.