Patrimoine du XXe siècle
Symbole de modernité à sa création, le silo d’Arenc a été édifié en 1927 sur le port de la Joliette pour la Compagnie des docks et entrepôts de Marseille.
Ce bâtiment de stockage de céréales a fonctionné jusqu’à la fin des années 1980 avant d’être désaffecté. Menacé de destruction durant plusieurs années, il a finalement été labellisé “Patrimoine du XXe siècle” en 2004, et sa réhabilitation confiée aux architectes Roland Carta, pour y aménager une salle de spectacles (deux tiers de l’espace), et Éric Castaldi, pour créer des espaces de bureaux (tiers restant).
Menés entre 2007 et 2011, ces travaux se sont inscrits dans le cadre des projets Euroméditerranée et Marseille Capitale Européenne de la Culture 2013. Avec une ligne directrice essentielle : préserver l’architecture des lieux, dont Le Corbusier se serait inspiré pour sa Cité radieuse.
Coque extérieure et mamelles de béton préservées
L’édifice est aussi imposant qu’atypique. Situé entre les quais et l’autoroute, c’est un bâtiment sur pilotis de 130 m de long sur 30 de large, dont l’ossature béton en nid d’abeilles est constituée de 57 fûts cylindriques verticaux, hauts de 18,50 m, entre lesquels s’intercalent 42 petites cuves. Transformer un tel site industriel en salle de spectacles a relevé du défi.
En façade, les courbes des silos extérieurs ont été conservées afin de préserver la physionomie du bâtiment. Mais à l’intérieur, l’espace a été totalement évidé pour créer une salle pouvant accueillir plus de 2 000 spectateurs.
Seule la partie inférieure des silos (les cônes de vidange), surélevée à 10 m du sol grâce aux pilotis, a été maintenue pour des raisons structurelles et esthétiques : elle sert aujourd’hui de majestueux plafond au hall d’accueil, opportunément appelé “Salle des Mamelles”. Quant aux creux des demi-coques de silos laissées pour la façade, ils servent de loges.
« Au début lorsque l’on regardait les plans c’était des polygones collés les uns contre les autres comme dans une ruche. Il a fallu enlever toutes ces alvéoles pour que la salle existe, explique Roland Carta*. Ça a été une expérience constructive, inquiétante et intéressante, sur un matériau formidable de noblesse qui est le béton avec sa poétique qu’il ne fallait pas trahir. On devait pouvoir travailler avec ce béton qu’il n’était pas question de masquer, d’envelopper car c’est l’histoire de ce lieu, son authenticité, sa vérité qui devaient être vues. »
Défis structurels et acoustiques
Pour éviter de fragiliser la structure, l’ensemble de l’intérieur du bâtiment a été tronçonné. La salle de spectacles, perchée à 17 m du sol, est soutenue par les poutres en croix d’origine, qui ont été consolidées par des poutres transversales.
Des dalles et des poteaux périphériques en béton, laissés bruts, ont également été ajoutés.
Par ailleurs, en toiture, une dalle de béton de 25 cm d’épaisseur, soutenue par la tête évasée des poteaux périphériques, contribue à une bonne acoustique.
Dans la même optique, 15 cm de béton ont été projetés sur les parois intérieures des demi-silos, qui ne faisaient que 12 cm d’épaisseur. Sans oublier l’ajout des habillages de bois venant absorber les réverbérations.
Olympia marseillais
Après quatre ans de travaux, le nouvel espace a ouvert ses portes au public en septembre 2011. Salle de spectacle polyvalente et modulable en fonction des événements, le CEPAC Silo y accueille aujourd’hui des ballets, concerts et pièces de théâtre, à raison de 80 spectacles par an, ainsi que des événements d’affaires.
Considérée comme un Olympia sur mer, la grande salle en théâtre à l’italienne, avec ses trois balcons, est devenue le lieu culturel phare du quartier Euroméditerranée, qui poursuit son ambitieuse rénovation urbaine.
*Source : https://www.eurosud-assurances.com/details-rencontre+avec+roland+carta-1141.html